Nous nous intéresserons ici principalement aux premières années de cette revue, au moment où Laisant façonne sa ligne éditoriale initiale, soit les années 1899-1904. Nous étudierons ainsi l’enchaînement des évènements qui ont amené à une telle entreprise et les mécanismes éditoriaux et réticulaires, voulus par Laisant, à l’œuvre. Nous soulignerons ensuite en quoi L’EM cristallise nombre de ses engagements.
À l’instar de L’IM fondé par Laisant et...
]]>La guerre de 1870 contre la Prusse se termine par une défaite cuisante de la France. Plusieurs scientifiques alertent sur le retard de la science française en général, et sur celui des mathématiques en particulier, par rapport à l’Allemagne.
L’intérêt de la France est de s’ouvrir aux mathématiques allemandes ainsi qu’à celles d’autres pays européens pour rattraper son retard. Cependant, la situation entre les deux anciens belligérants est si tendue qu’une initiative personnelle et isolée n’a...
]]>La puissante formule de Laisant mise ici en exergue résume ses convictions à la fois intellectuelles, pédagogiques et politiques les plus profondes. Figurant dans la brochure L’Éducation de demain, dont la 1re édition paraît en 1906, elle revêt une double signification. La première renvoie à l’essence même de l’instruction : si une éducation se donnait vraiment pour but de développer une pensée critique dans les jeunes générations, alors celles-ci seraient conduites à analyser le fonctionnement de la société et à juger l’injustice sociale intolérable, estime Laisant. Cette idée, maintes fois reprise, traduit le rôle crucial qu’il accorde à l’éducation dans l’évolution de la société et traduit son optimisme politique. La deuxième signification de ce slogan concerne le fondement même de l’indignation qui mène à la révolte : cette indignation n’est pas d’abord de l’ordre de l’émotion et de la colère, elle résulte d’un jugement réfléchi. Chez Laisant, l’élan révolutionnaire n’est pas pu...
]]>Ces deux personnalités contemporaines du xixe siècle sont passées toutes les deux par l’École polytechnique à la fois comme élèves puis, successivement, comme répétiteurs de mécanique.
Ces deux proches du docteur Ange Guépin, grande figure nantaise du xixe siècle, ont aussi joué un rôle politique national sous la Troisième République comme députés, et même ministre des Colonies pour Paul Guieysse, tout en s’orientant vers l’enseignement, notamment celui des mathématiques.
Fig. 2. Paul Guieysse décryptant des hiéroglyphes à l’École des hautes études.
L’approche comparative proposée s’attachera à développer à la fois les points de ressemblance entre leurs parcours individuels mais aussi les différences reflétées par leurs itinéraires spécifiques.
Laisant est né le 1er novembre 1841 à la Basse-Indre, à quelques kilomètres de Nantes, dan...
]]>Après avoir décliné, l’influence culturelle française au Brésil, y compris dans les domaines de la science et de l’éducation, s’est renforcée tout au long du xixe siècle et jusqu’à la Première Guerre mondiale. L’élite brésilienne a alors cherché des références en priorité du côté de la France, à la fois dans les modèles institutionnels, les livres scientifiques et la langue française, qui était jusque dans les années 1920 la langue scientifique quasi officielle. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant qu’un nom tel que celui de Charles-Ange Laisant, important dans l’enseignement français, se soit rapidement fait connaître au Brésil.
La circulation des idées pédagogiques de Laisant au Brésil, analysée selon la théorie des transferts culturels, est un exemple de transfert pédagogique de la France vers le Brésil qui mérite d’être étudié dans l’histoire de l’enseignement des mathématiques.
Au niveau international, Laisant a non seulement excellé en tant qu’auteur d’ouvrages didactiques ...
]]>Charles-Ange Laisant publie l’Initiation mathématique (IM) pour la première fois en 1906 à Paris chez Hachette, à Genève chez Georg. Notre propos n’est pas ici de détailler l’ensemble des leçons mais plutôt de caractériser l’IM selon trois principes fondamentaux de la pédagogie de Laisant : manipuler, visualiser et étonner. Même si les leçons de l’IM ne peuvent pas se réduire à l’un ou à l’autre de ces principes, ils permettent néanmoins de saisir pleinement la démarche de Laisant mise en œuvre pour progressivement atteindre ses objectifs.
L’IM s’inscrit dans la trajectoire personnelle du mathématicien et homme politique, militant pour un enseignement rénové des mathématiques (voir chap. 1). Il publie l’IM à la suite de La Mathématique. Philosophie – Enseignement et plusieurs conférences données à l’Institut psycho-physiologique de Paris et notamment à la suite de celle, éponyme, du 9 février 1899. L’Enseignement du Calcul, édité en 1...
]]>Laisant écrit en 1898 que « la mathématique » est une science expérimentale et rejoint ainsi des conceptions que Jules Houël en 1867 et Charles Méray en 1874 ont avancées avant lui. Il joue un rôle de passeur en faisant connaître en 1901 les Nouveaux éléments de géométrie de ce dernier, alors qu’une réforme de l’enseignement de la géométrie se met en place en France. Les manuels de Carlo Bourlet et d’Émile Borel s’en inspirent de manière différente. Au-delà de la France, la réforme de l’enseignement passe aussi par une approche expérimentale des mathématiques. Le souci de Laisant d’unifier les éléments de « la mathématique » le rend proche du réseau autour de l’Université de Chicago, dans lequel Adelia Hornbrook, John Dewey, Eliakim Moore et George Myers promeuvent la « laboratory method ». Laisant se trouve ainsi à la croisée de plusieurs réseaux où se pose la question de passer d’une géométrie expérimentale à une théorie géométrique.
En 1893, Laisant ne se représente pas à la députation et quitte la vie politique. Il devient enseignant à l’âge de 52 ans. Sa nouvelle carrière débute à l’École Monge, un établissement secondaire fondé en 1869 par un polytechnicien, Aimé Godart. L’École Monge est alors considérée comme un établissement d’avant-garde pour ses choix pédagogiques, ce qui séduit probablement Laisant.
Après l’École Monge, il devient en 1895 professeur à l’École Sainte-Barbe, l’une des meilleures écoles préparatoires au concours d’admission à l’École polytechnique. La même année, il devient également examinateur d’admission à l’Institut agronomique et répétiteur de mécanique à l’École polytechnique. En 1899 il sera nommé examinateur d’admission dans cette École.
Ce parcours, somme toute assez classique au xixe siècle pour un polytechnicien qui se tourne vers l’enseignement, sera jalonné d’engagements qui prolongeront ceux de sa carrière politique. C’est à un engagement moins connu que ses actions en faveur ...
]]>D’après le Petit Larousse, le mot encyclopédiste avec un petit « e » signifie auteur ou collaborateur d’une encyclopédie, le mot « Encyclopédiste » avec un grand « E » étant réservé à un collaborateur de l’Encyclopédie de Diderot et de d’Alembert. Toujours d’après le même dictionnaire, une encyclopédie (générale) est un ouvrage où l’on expose méthodiquement ou alphabétiquement l’ensemble des connaissances universelles.
Dans cet article, nous nous proposons de montrer que Charles-Ange Laisant peut être considéré comme un encyclopédiste. En effet, ses connaissances mathématiques étendues et variées, son intérêt pour l’enseignement et la pédagogie et ses engagements dans diverses sociétés scientifiques ne pouvaient que le prédestiner à être un auteur et un collaborateur d’une telle entreprise. La Grande Encyclopédie était le projet qui lui convenait.
Mais pourquoi une telle aventure ? Pourquoi en cette fin du xixe siècle tant de scientifiques, de gens de lettres, de linguistes, d’histori...
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